Un.e pervers.e? Un.e traumatisé.é? Une personne curieuse? Quel est le profil psy des personnes adeptes des pratiques de domination-soumission?
Se faire bander les yeux, être attaché.e, ligoté.e, fouetté.e, claqué.é, humilié.e, dominé.e…Bander les yeux de l’autre, l’attacher, le.la ligoter, le.la fouetter, le.la claquer, l’humilier, le.la soumettre… Les jeux de soumission et de domination peuvent exciter. Ou effrayer. S’ils ont été popularisés par les livres “Fifty Shades of Grey” de la romancière britannique E.L. James et leurs adaptations cinématographiques, ils restent malgré tout entachés de soupçons pathologiques. Ne faut-il pas être blessé.e par la vie pour pouvoir jouir d’être soumis.e, dominé.e, volontairement torturé.e? Quelles blessures cherche-t-on à soigner? Quels traumas érotise-t-on? Quel manque d’amour comble-t-on quand dominé.e, on est l’objet de toute l’attention de l’autre?
Dans le passé, bien des grandes figures scientifiques ont fait le lien entre BDSM et traumatismes infantiles et/ou autres tracas psys. Freud pensait que la personne aimant être dominée et malmenée veut être traitée comme un enfant en détresse. Le psychanalyste et psychiatre américain Robert Stoller avançait que de telles pratiques permettent de dépasser un traumatisme sexuel de l’enfance. Tout comme le sexologue canadien Claude Crépault estimait que ces activités sont des manières de revivre une scène traumatisante en la maîtrisant. Il est dit aussi que les adeptes du BDSM répondent à des fantasmes de fusion, de romance absolue – on est “le” centre de l’attention de l’autre -, de fantasmes d’abandon et d’échappement à la conscience de soi…
Mais ces analyses sont-elles réellement pertinentes? C’est ce qu’a voulu savoir l’équipe belge du Collaborative Antwerp Psychiatric Research Institue sous l’impulsion de la chercheuse et psychologue Alana Schuerwegen. Pour savoir si les pratiques BDSM répondent à des expériences traumatisantes de l’enfance, ils ont interrogé des centaines d’adeptes des jeux BDSM -256 pour être exacte – avec quelque 300 non praticiens. Et les résultats de l’étude sont des plus intéressants. (1) Ils mettent en évidence que les adeptes du BDSM ne cherchent pas à réparer des blessures d’enfance. Mieux encore, leurs types d’attachement sont bien plus “sécures” que ceux de la population non BDSM. Les personnes qui ont de tels jeux sexuels se rapprochent émotionnellement sans problème de leur partenaire ! Ils peuvent accorder leur confiance à l’autre sans soucis (ils le doivent même s’ils peuvent profiter de la pratique) ! Pas d’attachement anxieux, ou évitant ou anxieux-évitant ! Voilà de quoi stopper toute éventuelle envie de stigmatisation de telles personnes.
Les adeptes du BDSM partageraient encore quelques qualités: celles d’être des personnes curieuses, avides de nouvelles expériences, pouvant s’adapter à de nouvelles situations et avides de sensations fortes.
Voilà de quoi vous rassurer peut-être si vous hésitiez ou culpabilisez à l’idée de vous lancer dans de telles pratiques!
- Schuerwegen, Alana et al (2021) “The Psychology of Kink: A Cross-Sectional Survey Study Investigating the Roles of Sensation Seeking and Coping Style in BDSM-Related Interests.” Archives of sexual behavior

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